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Pierre Jean Jouve
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Dictionnaire Pierre Jean Jouve

Stefan Zweig
(1881-1942)

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Zweig et Jouve — Notes fragmentaires

Les amis européens communs :
Tolstoï, Freud, Malwida von Meysenburg,  Spitteler, Schnitzler, Rilke, Busoni,
Le Congrès international des femmes pour la paix

Il y aurait sans doute beaucoup à dire sur l'amitié qui a uni Stefan Zweig et Pierre Jean Jouve. On en a des échos dans Le Journal des années de guerre de Romain Rolland, dans la correspondance de Zweig lue dans Jouve avant Jouve de Daniel Leuwers. Dans le magnifique livre de souvenirs de Zweig lui-même, Le Monde d'hier (1942, posthume), nous lisons :

A Genève je rencontrai aussi dès le premier soir le petit groupe de Français et d'autres étrangers qui se rassemblaient autour de deux petits journaux indépendants, La Feuille et Demain : Pierre Jean Jouve, René Arcos et Masereel. Nous devînmes des amis intimes, avec ce rapide élan qui ne noue d'ordinaire que des amitiés de jeunesse.

C'est ainsi que j'ai organisé à Zurich, fait unique dans cette guerre, une lecture en commun avec P. J. Jouve — il lut ses poèmes en français, moi en allemand, des passages de mon Jérémie.

Dans son Romain Rolland vivant (1920),  Jouve avait  déjà témoigné sur cette  amitié :

Et Zweig (dont l'oeuvre européenne ne date pas de 1914) fut la première voix tragique, venue d'Autriche, et appelant vers Romain Rolland (en automne 1914). Zweig vint ensuite en Suisse (1917). Il y fut un des hommes les plus nobles et les plus courageux de notre petite Europe.

C'est en novembre 1917, à l'occasion d'une répétition de sa pièce Jérémias, que l'Autrichien Zweig, devenu très tôt pacifiste, avait obtenu l'autorisation de se rendre en Suisse. Il y avait retrouvé Romain Rolland, son correspondant et ami avec qui il partageait des articles, des projets, des traductions et des admirations réciproques. Zweig avait ainsi fait la connaissance de Jouve et des amis pacifistes (René Arcos, Charles Baudouin, Frans Masereel, Guilbeaux, Jean Debrit, Claude Le Maguet). Zweig avait déjà décrit cette communauté dans sa biographie de Romain Rolland (1921). Le premier portrait qu'il trace est celui de Jouve :

Le premier d'entre eux, P. J. Jouve, le poète de ces pathétiques recueils de vers : Vous êtes des hommes et Danse des morts, qu'une bonté ardente poussait à des excès de colère ou à des extases, souffrant de tous ses nerfs à cause de l'injustice du nombre, tel Olivier ressucité, donne libre essor, dans ses poèmes, à sa haine de la violence. (Traduction de O. Richez).

Dans son livre, Stefan Zweig, le voyageur et ses mondes (Belfond, 2011), Serge Niemetz écrit :

Zweig rencontre là Pierre Jean Jouve, "dont le visage tout en finesse et en ferveur [l']émeut sur le champ", Frans Masereel [...] et le pacifiste suisse Albert Dreyfus [...]. Après  la conférence, au café, tous sont très gais, c'est "une bonne soirée entre camarades". [...]  Mais, parmi ses nouvelles connaissances,  il opère déjà un tri. [...]  Avec Jouve, dont Rolland  avait dès novembre 1915 recommandé  à Zweig la lecture de Vous êtes des hommes, en quoi il voyait  l'oeuvre  "la plus humaine"  publiée en France  à cette époque, Zweig  communie  dans un "accord parfait".   

Le Journal de guerre de Romain Rolland, en date des 21 et 22 octobre 1918 témoigne d'un parallèle significatif entre Zweig et Jouve : tous deux, indépendamment, viennent de lui écrire des lettres qui témoignent du "même découragement" devant les événements politiques qui suivent  la fin de la guerre. Rolland "essaie de les remonter tous les deux".


On retrouve Zweig et Jouve ensemble à Florence au début de l'année 1921, au moment où Jouve est en pleine crise de ce "découragement" dont parlait Romain Rolland ; nous dirions aujourd'hui : en pleine dépression. Le couple Pierre et Andrée Jouve a loué la villa Galilée dans les environs de Florence. Les Jouve reçoivent des "paying guests" et divers visiteurs, à la façon de Romain Rolland en Suisse : le peintre Edmond Bille, le poète unanimiste Luc Durtain, Madame de Wiskowatoff, Miss Paget — Vernon Lee —, Theodor Daübler, von Unruh. Parmi les amis il y a aussi Stefan Zweig, et comme paying guest, la psychiatre, alors genevoise, Blanche Reverchon qui connaissait Andrée Jouve et Madeleine Rolland. Zweig écrit à Romain Rolland une lettre qui est citée par Daniel Leuwers : 

Chez les Jouve nous avons fait la connaissance de Mademoiselle Reverchon,  une amie de votre soeur et il était bon de causer avec cette femme  charmante et si fine de vous.

Les événements vont se précipiter : Stefan Zweig invite Pierre Jean Jouve et Blanche Reverchon chez lui au Kapuzinenberg, à Salzbourg, pour participer au congrès de la Ligue internationale des Femmes pour la Paix et la Liberté. Début août 1921, le futur couple est reçu par Friderika (Stefan est en voyage) et Jouve prononce deux conférences. Ainsi débute la "vita nuova" que Jouve doit à sa nouvelle vie avec Blanche, maîtresse amoureuse, médecin psychiatre bientôt traductrice des Trois essais sur la théorie de la sexualité de Freud et psychanalyste, et mystique.

Les poèmes de 1922 (Voyage sentimental, que Jouve reniera plus tard) sont emplis du souvenir des événements amoureux connus à Salzbourg, dans l'amitié de Zweig ...

Comme tu l'as bien dit, ami Stefan, en parcourant la terrasse, — il fallait ici du génie.

...et dans la musique de Mozart. En mai 1922 Jouve consacre un bel article à Zweig dans L'Humanité à l'occasion de sa venue à Paris. La correspondance de Jouve et Zweig se poursuivra. Lors de la brouille entre Jouve et Romain Rolland (1927), Zweig (comme tous les amis de jeunesse de Jouve) se mettra du côté de Rolland (selon une correspondance très partiellement connue entre Rolland, Zweig, Jouve, Andrée et Blanche), mais Zweig et Jouve se retrouveront. Dans les années qui suivront le divorce de Pierre et Andrée et le mariage de Pierre et Blanche (1925), Zweig restera fidèle à l'amitié qu'il portait aux deux anciens époux. 

Dans la bibliothèque d'Andrée Jouve on trouve des livres de Zweig (par exemple son Fouché de 1931 ou son Freud de 1932) dédicacés à Andrée.

Dans une lettre du 10 mai 1937, Zweig félicite Jouve pour ses poèmes de Matière céleste qui venait de paraître :

Tu es allé très loin du point où tu as commencé. La parole s'est spiritualisée sans perdre sa musique [ … ] Tu transformes la parole lyrique en magie. 

Jean-Paul Louis-Lambert


Amitiés et admirations croisées

Stefan Zweig, Frans Masereel, Pierre Jean Jouve

Heures — Livre de la grâce

(1920, édité par les auteurs, Librairie Kundig, Genève)

Poèmes de Pierre Jean Jouve,
Frontispice de Frans Masereel,
Dédicace à Stefan Zweig


Heures livre de la grâce - Couverture
Heures livre de la grâce - Frontispice
Heures livre de la grâce - Dédicace
Également en 1920

Stefan Zweig dédicaçait sa nouvelle d'inspiration pacifiste "Obsessions" (Der Zwang : eine Novelle, publiée avec dix gravures de Frans Masereel — représentant surtout le couple Stefan et Friderika Zweig – chez Insel-Verlag à Leipzig) :

„Pierre J. Jouve in brüderlicher Freundschaft

(À Pierre J. Jouve, en fraternelle amitié)

Andreas Latzko

Le dernier homme

Trad. de René Arcos et David Roget
Bois gravés de Frans Masereel
Présentation de Stefan Zweig

Éditions du Sablier, 1920
Le dernier Homme Le dernier Homme
Le dernier Homme
La communauté pacifiste de Suisse (et en particulier Jouve) avait été très impressionnée par les témoignages, sans censures, intitulés Menschen im Krieg ("Hommes en guerre") de l'écrivain officier austro-hongrois Andreas Latzko. Les animateurs des éditions du Sablier (Frans Masereel, René Arcos) publièrent son Dernier homme avec une présentation de Stefan Zweig.
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Sous la Responsabilité de Béatrice Bonhomme et Jean-Paul Louis-Lambert

Dernière mise à jour : 16 juin 2013
Première mise en ligne : 16 mai 2013